septembre 2019

Bacon en toutes lettres

Nous ne serons bien entendu pas les seuls à vous conjurer d’aller voir l’exposition-événement de Francis Bacon au Centre Pompidou.
Dire que nous avons adoré est un euphémisme.
Dire que nous avons tout compris serait présomptueux.
Remuant et bouleversant, évidemment.

 

1971, point de passage
1971, Francis Bacon se prépare à la rétrospective qui consacre enfin sa reconnaissance, au Grand Palais. Quelques jours avant le vernissage, son compagnon George Dyer se suicide…
Et dès les premiers regards posés sur les murs, on en prend plein la tronche.
Bacon peint le réalisme violent de sa douleur.
Sang, ombres, chairs malaxées, visages déformées, ça envoie du chaos et du désespoir.
Les portes sont ouvertes, mais les couloirs sont noirs, les ampoules pendent des plafonds, témoins de la solitude des corps.
Le rose, le beige, le vert d’eau s’étirent en arrière plan et donnent encore plus de profondeur aux marbrures de la peau.
Les portraits sont grimaçants, grinçants et parfois presque comiques.
Bacon se joue des codes et de ses maîtres, Picasso, Velasquez, Cimabue…
Ses toiles ont le goût du cubisme rond, du réalisme concentré, de l’irrévérence religieuse.

 

Nietzsche et Eschyle en héritage
L’exposition met en parallèle les oeuvres de Bacon et les poètes, penseurs et tragédiens qui l’ont influencé.
Eschyle, Nietzsche, Joseph Conrad, T.S. Eliot, Georges Bataille,  Michel Leiris, dont les textes sont lus dans d’intimes zones d’écoute par de grands comédiens.
Pour autant, le parcours n’est pas limpide et l’absence de cartel ne facilite pas la compréhension du lien entre les lettres et les toiles impressionnantes de cet artiste sous influence.
Qu’à cela ne tienne…

 

Bacon en toute intensité
On a donc finalement peu écouté et beaucoup regardé.
On a perdu pied dans ses triptyques bouleversants.
On a été bousculé par ses gueules cassées et ses corps maltraités.
On s’est reposé sur la douceur de ses aplats colorés.
On a tenté de reconnaitre le visage facétieux du peintre dans ses autoportraits.
On a pensé à Schiele, à Lucian Freud, à Picasso, à Giacometti, ses artistes qui ont joué avec les corps humains.
On a cherché des repères qu’on n’a pas trouvé.
On est sorti comblé.